Mise à jour 20 août 2021

Tout à son souci de « sauver des phénomènes » (livres rares, précieux, singuliers), le bibliophile court souvent le risque de se voir identifier à sa caricature, le bibliomane. Mais il arrive aussi au collectionneur de couper les pages des livres, de les lire, voire d’en écrire lui-même ou de favoriser leur publication. On découvrira donc dans ces n portraits des amateurs au sens premier du terme : érudits, bibliographes, chasseurs de textes ou lecteurs toujours heureux de se retrouver eux-mêmes en découvrant le monde dans leur petit ou grand « cabinet ».

Leurs trésors sont aussi bien des reliures avec armes et fanfares aussi bien que le modeste volume demeuré « dans son jus ». Riches ou pauvres (mais rarement enrichis par la vente de leur bibliothèque), aristocrates ou gens du peuple, précurseurs ou illuminés, ces personnages qui, dans le meilleur des cas, ont droit à quelques lignes dans les « encyclopédies » méritent tous d’être considérés comme les gardiens de Bibliopolis, la cité des livres en laquelle s’est incarnée la République des lettres.

Yann Sordet est sorti major de l'École nationale des chartes en 1997 avec une thèse consacrée à l'histoire des pratiques bibliophiliques (L'Amour des livres au Siècle des Lumières : Pierre Adamoli et ses collections), couronnée par le prix Auguste Molinier.

En 2011 il est nommé directeur de la Bibliothèque Mazarine.

L’histoire n’étant pas seulement le récit des événements, mais aussi l’évocation des individus, l’histoire de la bibliophilie doit être d’abord celle des bibliophiles. Collectionneurs de livres rares – parce qu’anciens ou à faible tirage –, ou singuliers – se distinguant par quelque chose d’extraordinaire –, ou curieux – dignes d’intérêt, voire étranges ou étonnants –, et précieux – par leur illustration, leur reliure, leur provenance ou leur texte, dans le but de construire une bibliothèque, leur vie se lit particulièrement dans les catalogues de vente de leurs bibliothèques. C’est pourquoi, pour servir à une histoire de la bibliophilie, j’ai retenu la biographie de cent soixante d’entre eux, du xvie au xxe siècle, tous découvreurs et protecteurs du patrimoine écrit et typographique, que j’ai nommés « Gardiens de Bibliopolis ».

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